La tension monte d’un cran à la Société Nouvelle Industrie (SNI) de Gbatope. Malgré une série d’engagements pris le 1er août dernier devant les représentants du personnel, les syndicats et la direction régionale du travail, la direction de l’entreprise est accusée de n’avoir respecté aucune des quinze recommandations qui lui avaient été adressées. En réaction, les travailleurs avaient récemment observé un mouvement d’humeur pour dénoncer des conditions jugées inhumaines et contraires au Code du travail. Une mobilisation pacifique qui semble aujourd’hui se retourner contre eux.
Ce 17 novembre, deux délégués du personnel et quatre employés ont été convoqués à la Brigade de Recherches et d’Investigation (BRI) à Tsévié, à la demande de la direction de la SNI. Les travailleurs sont accusés de « violences » et de « manifestations illégales ». Une décision qui fait vivement réagir le Mouvement Martin Luther King (MMLK), qui suit le dossier de près et dénonce un « renversement des rôles » où les victimes deviennent les accusés.
Selon le communiqué de l’organisation, les griefs exprimés par les travailleurs reposent sur le non-respect d’engagements aussi fondamentaux que la mise en place d’un règlement intérieur, la formalisation des contrats de travail, la création d’un comité de sécurité et santé, l’immatriculation à la CNSS ou encore la fourniture d’équipements de protection individuelle. D’autres points touchent directement au bien-être et aux droits sociaux : bulletins de paie, respect des horaires, rémunération des heures supplémentaires, indemnité de transport, remboursement des prélèvements arbitraires et paiement des primes réglementaires.
Le MMLK souligne aussi le traitement différencié observé lors de la convocation à la BRI. Alors que les employés convoqués étaient présents avant 10 heures comme indiqué dans les ordres de convocation, des expatriés libanais employés par la SNI ne se seraient présentés qu’après 11 heures avant de repartir avant 13 heures. Les travailleurs, eux, sont restés jusqu’à 17 h 30. Une situation qualifiée d’« outrageante » par le mouvement, qui y voit un symbole des inégalités persistantes dans certaines entreprises de la zone franche.
L’organisation pointe par ailleurs « l’insolence et l’arrogance » de certains expatriés qui, malgré de multiples dénonciations concernant des traitements jugés cruels ou humiliants, bénéficieraient d’appuis locaux pour assurer leur défense. Un état de fait jugé intenable par le MMLK, qui appelle les autorités à agir sans délai.
Pour le mouvement, l’affaire SNI Gbatope révèle une réalité plus large : le non-respect systématique, selon lui, des droits des travailleurs dans plusieurs entreprises de la zone franche. Il invite les pouvoirs publics à renforcer les contrôles, sanctionner les abus et garantir que les lois togolaises — aussi bien le Code du travail que les conventions collectives — soient effectivement appliquées.
« Non au droit de vie et de mort sur les travailleurs, non à l’esclavage moderne », conclut vigoureusement le communiqué. Le MMLK réclame une intervention urgente pour que la crise trouve une issue juste et que les droits fondamentaux des travailleurs soient enfin respectés dans les entreprises concernées.
Ce type d’affaire ouvre la porte à un débat plus vaste sur le modèle social des zones franches et sur les mécanismes à renforcer pour éviter que des tensions anodines n’évoluent vers des crises structurelles.
La rédaction






